L’aller vers : un enjeu de santé publique et de cohésion sociale
Pour cette nouvelle newsletter, le comité de rédaction m’invite à rédiger un édito sur « l’aller vers ». Lorsque je questionne internet, mon moteur de recherche préféré me demande où je souhaite aller et quel est mon lieu de départ ! Dans un premier temps, je constate que le logiciel n’a pas compris ma demande car je ne suis pas en attente du meilleur itinéraire pour rallier Rennes ou Paris depuis Brest. Et puis à bien réfléchir, je me dis que les deux questions qui me sont posées sont pertinentes. Car l’aller vers fait bien référence à un déplacement au sens où il s’agit de sortir physiquement de sa structure pour aller à la rencontre de publics. Le moteur de recherche aurait pu également me demander pour quelles raisons j’aspire à me déplacer et comment je souhaite le faire ! L’aller vers a pour finalité la lutte contre le décrochage social et le non-recours aux droits, et consiste à modifier ses pratiques professionnelles pour tenter d’y répondre. Enfin le moteur aurait pu ajouter deux dernières questions se rapportant à la durée et au coût de mon trajet. La démarche proactive réclame du temps et des moyens humains et financiers. Se déplacer dans le milieu de vie des personnes en situation de précarité, prendre le temps de les écouter, les accompagner dans une démarche d’éducation à la santé et à la citoyenneté est quasiment un luxe aujourd’hui dans un contexte de diminution des aides financières dans le secteur de la santé et du social. Et la Mutualité Française Bretagne : comment met-elle en pratique cette démarche ?
Nous avons à cœur d’entrer en relation avec les publics qui sont les plus éloignés de la prévention et de l’accès à la santé et aux soins. L’accès à la santé de toutes et tous fait partie de notre ADN. Miser sur la prévention plutôt que sur la réparation est aussi notre credo. Cela se traduit alors par une démarche d’aller vers les partenaires qui sont au contact des publics fragilisés pour mettre en œuvre des solutions décloisonnées. Nous avons toujours misé sur la coopération avec d’autres acteurs. Nous défendons bien l’intervention le plus en amont possible. Les mutuelles pourraient d’ailleurs davantage le faire si elles pouvaient utiliser les données de santé en leur possession à des fins de prévention et de gestion du risque. Une façon d’aller vers les populations en situation de précarité est aussi d’augmenter leur pouvoir d’achat. La santé est bien souvent le dernier poste de dépense des ménages ayant des bas revenus. Nous proposons donc de baisser le taux de la Taxe de Solidarité Additionnelle (TSA) applicable aux contrats santé ne bénéficiant pas d’avantage fiscal ou de prise en charge par l’employeur (retraités, chômeurs ne bénéficiant plus de la portabilité, jeunes sans emploi…). L’aller vers c’est aussi davantage de proximité et d’ancrage local. Il convient d’encourager toutes les expérimentations permettant de faciliter l’accès à la santé et aux soins sur les territoires. Nous suggérons de tester l’équipe de soins traitante sur des zones caractérisées par une offre de soins particulièrement insuffisante.
In fine, encourager la promotion de la santé et agir sur tous les déterminants sont des conditions sine qua non pour permettre aux personnes d’exercer leur pleine citoyenneté. En cela, l’aller vers répond à un enjeu de santé publique mais aussi un enjeu démocratique. Ne laisser personne sur le bord du chemin est aujourd’hui plus que d’actualité. Et vous, vers qui allez-vous ?
Fabienne Colas
Présidente Mutualité Française Bretagne