Les séniors veulent rester le plus longtemps possible chez eux, est-ce réaliste ?

Selon les dernières projections de l’Insee, près de 12,1 millions de personnes auront 75 ans ou plus en France en 2050. Derrière ce chiffre brut, c’est le choc de la gestion de la dépendance qui se profile à l’horizon. Au cœur de ces préoccupations, l’hébergement, avec un objectif en tête : rester le plus longtemps possible chez soi. Mais ils sont encore peu nombreux à adapter leur logement. Et qu’en est-il, si les personnes ont également besoin de soins ?

Les Français souhaitent de plus en plus rester chez eux pour leurs vieux jours. C’est en effet une idée très présente, y compris chez ceux qui n’ont pas encore pris de dispositions particulières. Une proportion qui reste majoritaire même dans le cas où ils seraient en situation de perte d’autonomie.

S’ajoutent alors des besoins de soins auxquels il faut pouvoir répondre. Depuis de nombreuses années, des services aident les personnes à rester chez elles en les accompagnant au quotidien comme les Services de Soins Infirmiers A Domicile (SSIAD), les Centre de Soins Infirmiers (CSI) et les Services d’Aide et d’Accompagnement à Domicile (SAAD). Découvrons ces services avec Catherine Naviner, directrice des services de soins à domicile de la Mutualité Française dans le Finistère.

Peut-on vivre jusqu’à la fin de sa vie à domicile ?

Catherine Naviner (CN) : Oui, tout à fait ! Si c’est le souhait de la personne et de la famille.

Nos différentes structures sont là pour aider les personnes nécessitant des soins au quotidien à rester chez elles le plus longtemps possible, en les accompagnant au plus près de leurs besoins.

La plupart des personnes que nous suivons restent à leur domicile jusqu’à leur fin de vie.

Évidemment, il peut y avoir, au cours du vieillissement, des difficultés qui ne permettent plus l’accompagnement de la personne dans les meilleures conditions. Les problèmes cognitifs en particulier peuvent rendre le maintien à domicile plus complexe, tout particulièrement si la personne déambule ou si le logement comporte des étages et ne peut pas être adapté. Un des premiers éléments de l’entrée en établissement est la chute. Elle peut motiver une entrée en institution par crainte, si cela se produit, que la personne soit seule et ne puisse se relever ou que cette chute n’occasionne un traumatisme important tel une fracture. Les systèmes de téléassistance sont efficaces mais ils nécessitent un relais de proximité.

Un autre point qui peut engendrer l’entrée en institution, c’est le comportement de la famille ou de la personne : il arrive que certaines familles ou personnes accompagnées fassent preuve d’exigences extrêmes, de violence verbale ou physique, ou bien ne mettent pas les moyens à disposition des intervenants, même a minima (matériel de transfert, linge propre, entretien à minima du logement avec parfois insalubrité des lieux…).

Concernant les personnes présentant un handicap, nos services d’aide et de soins les accompagnent quotidiennement. Le SAAD de Lorient est dédié spécifiquement à l’accompagnement des personnes présentant un handicap et a développé une grande expertise en la matière.

Qu’appelle-t-on « soins à domicile » ?

CN : Le terme de soins fait référence aux soins prodigués par un personnel soignant dans le cadre de soins ponctuels, de suites d’hospitalisation, d’hospitalisation à domicile ou de maintien à domicile. Ils comprennent les soins techniques et soins d’hygiène et la relation d’aide et d’éducation thérapeutique.

Leurs actions diffèrent de celles de l’aide à domicile qui se positionne principalement dans de l’accompagnement et de la suppléance. Cependant elles sont complémentaires et permettent dans le cas de maintien à domicile d’apporter tous les soins et l’aide nécessaire, y compris à l’aidant, pour permettre de respecter ce choix de vie sans difficulté majeure si le plan concerté est adapté aux besoins et répond au prendre soin global.

Qui définit le besoin de soins à domicile (médecin, HAD, famille) ?

CN : La délivrance de soins à domicile est subordonnée à une prescription médicale. Dans le cas de l’hospitalisation à domicile et de l’accompagnement nécessitant des soins (pathologie chronique ou installation d’une dépendance), l’accompagnement est d’autant plus concerté. Le personnel soignant, infirmier(ère) en soins généraux (IDE) et aide-soignant(e), a pour mission, en fonction de ses compétences, de relayer au médecin toute évolution de l’état de la personne soignée afin que celui-ci réajuste régulièrement le traitement et les prescriptions de soins.

Qu’est-ce qu’un SSIAD (service de soins infirmiers à domicile)

CN : Le SSIAD est un service médico-social qui fonctionne sur autorisation et tutelle de l’Agence Régionale de Santé (ARS) avec un nombre de places dédiées correspondant au nombre de personnes à accompagner chaque jour. Ces places sont identifiées majoritairement pour des personnes âgées (plus de 60 ans), mais nous avons également des places pour des personnes présentant un handicap (moins de 60 ans). Le budget alloué intègre la totalité du coût de l’accompagnement.
Y travaillent des aides-soignants, mais également des infirmiers qui interviennent en complémentarité pour les actes techniques comme les injections, les pansements qui se rajoutent à la prise en charge. Ceux-ci préparent également les traitements.

Le rôle du SSIAD est de permettre le plus longtemps possible le maintien à domicile des personnes accompagnées, en préservant au maximum leur autonomie, dans le respect de leurs habitudes de vie et en complémentarité avec les autres services.

Nous assurons une coordination autour du patient en assurant le relais avec le médecin, les services d’aide à domicile, les tutelles, les centres hospitaliers. Nous pouvons intervenir pour les soins d’hygiène en partenariat avec l’Hospitalisation A Domicile (HAD). Cet accompagnement est réalisé dans le cadre de notre activité. Seuls les soins techniques réalisés par les IDE sont facturés à l’HAD car trop onéreux sur notre budget de fonctionnement.

Le plan de soins est élaboré en concertation avec la famille et la personne concernée par un infirmier coordinateur qui a également une fonction d’encadrement de l’équipe.

Le SSIAD de Quimper a également une activité Equipe Spécialisée Alzheimer (ESA) et intervient sur un large secteur correspondant à la zone d’activité de nos SSIAD, mais également sur les secteurs de Quimperlé, Briec et Concarneau agglomération.

4 ergothérapeutes travaillent dans cette équipe qui a une antenne dans les locaux du SSIAD associatif de Concarneau avec lequel nous avons développé un partenariat.

Pourquoi choisir le SSIAD pour faire effectuer les soins ?

CN :Un des avantages d’être suivi par un SSIAD, c’est l’accompagnement optimal de la personne avec une adaptation aux besoins régulièrement actualisés grâce à la coordination de la structure.

Cette coordination permet d’entretenir le lien avec la famille, la tutelle, les autres intervenants, les services… mais elle permet aussi une concertation pour prévenir les risques au maximum et aider à la mise en place des solutions adaptées.

Autre avantage, nous intervenons à des horaires réguliers et concertés, contrairement à une tournée infirmière où les horaires varient en fonction des actes techniques se rajoutant à ce type d’interventions qui peuvent même parfois être planifiées avant 6 heures du matin ou après 13h pour des soins d’hygiène.

Les Aides-Soignants (AS) et infirmiers de nos SSIAD ont des tournées organisées qui tiennent compte des besoins en soins de chaque personne. Le personnel de nos services est salarié et donc les horaires sont encadrés par les besoins en soins et la convention du secteur d’activité.

Un point important aussi est la compétence de nos salariés. En effet, nous organisons des formations adaptées aux pathologies rencontrées, et axées également sur la prévention des risques, pour le personnel mais également pour les personnes accompagnées (aménagement de l’espace de vie, matériel et postures adaptées, premiers secours). Nous avons également 8 Assistants en Soins Gérontologiques (ASG) qui travaillent au sein de l’Equipe Spécialisée Alzheimer, équipe intégrée aux SSIAD. Ceux-ci font bénéficier les personnes de leurs compétences acquises au quotidien.

Les valeurs soignantes et l’implication de tous nos salariés s’inscrivent dans la raison d’être du groupe mutualiste VYV3 : « Se mobiliser chaque jour, au cœur des territoires, pour prendre soin de chacun ».

Quelles sont les spécificités de nos SAAD (service d’Aide et d’Accompagnement à Domicile)

CN : Ceux-ci interviennent sur une partie de nos secteurs d’intervention de soins.

Celui de Rosporden partage les locaux du SSIAD et du CSI, ce qui rend le travail de coordination et concertation bien plus performant et aisé, le plan d’aide et de soins étant élaboré en commun lorsque les 2 services interviennent chez une même personne.

Nous intervenons à 75% de notre activité auprès de personnes relevant de l’APA, de la Prestation de Compensation du Handicap (PCH) ou de l’aide sociale.

La fonction d’un SAAD est d’accompagner la personne dans les actes de la vie courante dont l’entretien du domicile, du linge, la préparation des repas, l’accompagnement aux courses, l’aide administrative. En fonction du niveau de dépendance de la personne, l’aide à domicile peut être amenée à faire les courses, l’aider à manger, faire la vaisselle, l’aider à effectuer sa toilette, l’aider à marcher, à se déplacer, voire la mobiliser pour aller du lit au fauteuil avec ou sans aides matérielles. L’aide à domicile a un rôle important de maintien du lien social par son écoute, les échanges verbaux, la stimulation psychologique pour prévenir l’apparition des troubles cognitifs. Elle peut faire le lien avec les associations et centres sociaux dont les bénévoles ont pour mission de rompre l’isolement.

Nous œuvrons à collaborer avec ces services et associations et formons certains bénévoles à la relation d’aide. Notre mission est d’identifier les besoins de la personne dans sa globalité, besoins qui évoluent en fonction de son âge et des événements de la vie comme le deuil du conjoint.

Les professionnels de l’aide à domicile sont formés avec les professionnels du soin sur les thématiques communes mais également dans des spécificités métiers comme la dénutrition, l’accompagnement au maintien des capacités cognitives en lien avec l’ESA.

Nos services sont complémentaires, c’est ce qui fait la richesse de notre accompagnement. La proximité des services d’aide et de soins renforce également la qualité et l’organisation de nos SAAD, tirés vers le haut dans une démarche qualité commune et managés dans une même dynamique d’accompagnement et de valorisation des salariés.

Quel lien entretenez-vous avec les EHPAD

Nous collaborons avec les EHPAD dans le cadre majoritairement de l’ESA. Les troubles cognitifs évoluant, et particulièrement dans le cas des personnes qui déambulent, ceux-ci rendent le maintien à domicile compliqué et l’aidant peut s’épuiser. Nous faisons le lien avec les accueils de jour et accueils temporaires pour soulager l’aidant et permettre une entrée progressive en structure si nécessaire. Nous transmettons également tous les éléments à l’EHPAD pour permettre une bonne intégration de la personne en structure si cette option est retenue.