Conseil lecture : “Bretagne secondaire, une année au pays des volets fermés » de Benjamin Keltz

Le littoral breton fait rêver. Il attire. Il se vend bien. Et c’est précisément là que réside le problème : quelle vie et quel avenir pour un territoire qui se vide de ses habitants à l’année, au profit de volets clos et de rues silencieuses hors saison ?

Dans Bretagne secondaire, Benjamin Keltz raconte une année passée à observer ce que devient la Bretagne face à l’explosion des résidences secondaires. Parti de son histoire personnelle et l’impossibilité pour lui de se loger dans le Pays de Saint Malo où il a grandi, Benjamin Keltz a enquêté en rencontrant des habitants, des travailleurs, des propriétaires qui louent leur bien sur les différentes plateformes américaines, des élus locaux… Son livre met ainsi en lumière les conséquences profondes de cette tendance sur l’accès au logement, les services publics, la santé, et même la démocratie locale.

Le premier constat est que la prolifération des résidences secondaires et des locations de courte durée a créé une pénurie de logements pour les résidents permanents. Les prix de l’immobilier ont grimpé en flèche, rendant l’accès à la propriété, et même à la location, quasi impossible pour de nombreux habitants. Ce phénomène touche tout le monde : les actifs, les jeunes, les familles, de tout milieu social et économique. Les saisonniers, les artisans, les médecins, n’arrivent plus à trouver de logement à proximité de leurs lieux de travail. Tous sont contraints de s’installer plus loin dans les terres, les obligeant ainsi à des déplacements plus long et coûteux pour rejoindre leurs lieux de travail, les services publics, le littoral.

Le deuxième enseignement est que cette pénurie de logement à l’année crée un déficit d’accès aux services publics. Ce sont des villages qui peinent à garder une école ouverte, des îles qui ne peuvent accueillir de médecin faute de logement abordable, un artisan contraint d’habiter en dehors du Golfe du Morbihan.

Benjamin Keltz souligne également les conséquences démocratiques de cette transformation. Les élus sont souvent démunis, tiraillés entre attractivité touristique et droit au logement pour leurs habitants. Et dans certaines communes, la part croissante de résidents secondaires – qui peuvent voter aux élections municipales – modifie les équilibres électoraux. A terme, cela pourrait conduire à des choix d’aménagement qui ne répondent plus prioritairement aux besoins des habitants permanents.

Mais face à cette situation, des solutions émergent. Des propositions de loi visent à rééquilibrer l’offre de logements locatifs en donnant aux élus locaux des outils pour réguler le marché, tels que la mise en place de quotas, ou encore la préemption du foncier par les collectivités. Cependant, leur efficacité dépend d’une volonté politique forte.

Depuis sa sortie, « Bretagne Secondaire » a déjà permis l’organisation de plusieurs débats partout en Bretagne, et c’est une avancée positive pour avancer sur cet enjeu essentiel de cohésion du territoire. En conclusion, foncez lire ce livre : C’est un récit journalistique drôle et poignant qui se lit comme un carnet de voyage.